A la mort de feu son mari, Eglantine s’installa dans un petit appartement au quatrième et dernier étage d’un immeuble cossu, donnant sur une rue commerçante et où elle pouvait observer son monde, derrière ses persiennes entrecroisées ou bien à l’abri en retrait, sur sa grande terrasse, là où elle dominait le monde, sans qu’on ne la voie. Elle avait déménagée avec Horace, son chat, qui en avait entendu des vertes et des pas mures tout au long des jours !
D’ailleurs lorsqu’il en avait un trop plein d’oreilles, il se cachait au milieu des coussins des canapés pour amortie la litanie qui n’allait pas manquer d’envahir la pièce dès que M’ame Pisse-Vinaigre entamerait son chapelet de critiques, à haute voix. Elle n’avait pas été toujours acariâtre comme prétendent certains mais ne pas être invitée au mariage ça dépassait l’entendement se disait-elle. Elle avait quitté le quartier mais sa mauvaise humeur n’avait fait que grandir. Lorsqu’elle fit donation à son fils unique, de sa très belle maison, elle ne réalisa pas sur le moment au fait que le fils avait une femme...
Aujourd’hui Horace présageait que les compliments concernant la bru, allaient pleuvoir ! Il y a des jours qui sont destinés aux uns ou autres en fonction des évènements qui se présentaient et aujourd’hui c’est la réception de la feuille d’impôt foncier, qui servi de déclencheur !
- Pendant que je suis là, Madame se pavane dans Ma maison ! J’lui avais dit au fils que ce n’est pas une femme à épouser !
- Qu’est-ce que j’ai contre elle ? D’abord elle m’a pris mon fils, ensuite ces filles qui viennent de la ville on ne sait même pas d’où elles sortent.
- Je connais ses parents depuis longtemps ? oui je sais Horace, mais n’empêche, elle vient quand même de la ville !
La façon dont Horace l’observe l’œil à moitié fermé comme celui qui ne veut pas entendre et fait semblant de dormir, ne laisse présager rien de bon, pour sûr il n’est pas de son avis cet animal-là !
- Tu penses que nous étions amis ? A vrai dire c’était pour faire plaisir à Henri que je les recevais tu le sais bien, trop le cul serré ces gens-là...tu hoches la tête et tu n’es pas d’accord ?...mais c’est ton droit !
Le mien c’est de dire qu’elle se maquille comme ...comme ...tiens je ne saurai te dire...et que je te veux qu’elle se maquille trop !
J’entends Horace, j’entends ! Mon fils à l’air heureux ? Horace tu m’énerves tu n’es jamais d’accord avec moi !
- Sa robe l’autre jour tu l’as vue hein alors qu’est-ce que tu en penses ? Elle lui allait bien ! y manquerait plus que ça qu’elle ait l’air d’un sac, au prix qu’elle a dû la payer, avec cet argent-là elle ferait mieux de payer les impôts !
- Je n’en sais rien ? non mais j’imagine, j’imagine Horace !...C’est ça, ferme les yeux et fait semblant de dormir ! N’empêche que je sais ce que je sais et s’il fallait que je dise ce que je sais on en serait toujours là à minuit!
Dors et fiche moi la paix, je m’en vais moi aussi au lit ça vaut mieux on va finir par se fâcher tous les deux! Boudiou