On dit, mais que ne dit-on pas sur internet, que le Père Noël n’est venu en Corse que dans les soixante dernières années. Moi qui suis bien plus vieille que ça, j’affirme haut et fort que je l’ai connu dans mon enfance. Certes le Petit Jésus apportait des bonbons aux enfants mais cela ne faisait nulle concurrence au Père Noël.
Il faut reconnaître que les bateaux n’étaient pas aussi confortables que de nos jours, aussi faire traverser le traîneau et les rennes n’étaient pas chose facile et surtout lorsque il fallait se réapprovisionner, tous les allers retours coûtaient cher, mais n’empêche que le père noël, aidé par les papas et les mamans, étaient là et bien là, parole d’Eglantine.
On dit aussi ici et là, que la tradition du réveillon de noël est venu bien plus tard, mais quelle drôle d’idée ! J’ai pour ma part (et souvenez-vous que je ne suis pas toute jeune), toujours connu une importance principale donnée au réveillon, sans l’oie ou le chapon, mais avec une place d’honneur pour le cabri. Il est bon de remettre parfois les idées reçues à leur place, voilà qu'il est fait continuons donc notre promenade, ou plutôt commençons nôtre promenade dans l’île de beauté au moment de noël.
Dans un temps que je n’ai pas connu, malgré mon âge avancé, on célébrait le soir de noël trois messes : la première à minuit, la seconde avant que le soleil ne se lève et la dernière dans la journée. Il est aussi de tradition de mettre dans la cheminée ce soir-là autant de bûches que de personnes vivant dans le foyer et en faisant bien attention de ne pas en oublier, ce qui aurait présagé un mort dans la famille dans l’année à venir. Dans certains villages, la jeunesse aujourd’hui encore, le matin du 24 décembre fait le tour des maisons pour récolter des bûches afin d’allumer un grand feu qui sera allumé à la sortie de la messe de minuit « le rocchiu » devant l’église ou sur la place du village, bois en provenance uniquement des jardins et des champs du village. Le lendemain, chaque famille vient ramasser les braises encore fumantes pour les mêler à celles de la cheminée familiale. Jadis le feu était entretenu pour brûler jusqu’au 1er janvier.
Il se dit aussi, que jusque dans les années 1900, en Haute-Corse, il y avait la coutume des 7 veillées. Les jeunes gens en petits groupes allaient rendre visite à 7 familles du village. Ils apportaient à chaque fois une bûche de bois pour chauffer l’âtre. Ils restaient alors un petit moment pour discuter et partager les pâtisseries préparées par la mère de famille.
C’est aussi le soir de noël que se transmet la prière pour chasser les esprits malfaisants et guérir humains et bêtes en égrenant la prière magique :"L’incantesimu". Un rite qui doit être précédé, pour celui ou celle qui veut le pratiquer, d'une incantation apprise exclusivement la nuit de Noël. Si on transmet cette incantation en dehors de Noël, le pouvoir est perdu. Dans le lointain de ma mémoire je revois une villageoise mettre dans une assiette creuse de l’eau dans laquelle elle faisait tomber quelques gouttes d’huile et elle murmurait la prière de «l'occhju auprès du malade pour conjurer le mauvais œil.