Le vieux Martin, habitait dans un petit village près de la nationale qui relie Ajaccio à Bastia. Son âne, s’appelait Martin aussi, comme beaucoup d’autres ânes, ce qui fait que lorsque les paysans du coin parlaient entre eux de Martin on ne savait jamais à qui s’adressait leurs propos.
Martin, Le vieux, n’en avait cure, il allait son petit bonhomme de chemin dans la montagne, suivant les saisons pêchant la truite ou ramassant noix et châtaignes, à moins qu’il ce ne fusse une halte auprès des bergers. Un fromage ou une brousse qu’on lui donnait généreusement, était toujours bon à prendre.
Martin pas l’âne, l’autre, sous des dehors bonasses et un peu niais, était en fait un érudit, il s’amusait beaucoup de ce que disaient dans son dos les gens du village. Le soir à là lueur de sa lampe à pétrole, il avait refusé qu’on lui fasse un branchement pour avoir l’électricité, cette lumière qui arrivait dont on ne sait d’où ne l’inspirait guère, donc à la douce lumière de sa lampe, Martin dévorait livre après livre.
Et c’est ainsi qu’il découvrit un beau jour dans un écrit, les escaliers « pas d’âne », drôle d’escalier se dit-il. Il habitait un village de montagne et certes lorsqu’on voulait grimper un peu plus haut à travers le maquis, on faisait passer devant et dans la végétation dense, les ânes pour créer un chemin, mais un escalier il n’en avait jamais vu. Aussi décida t-il d’observer son âne.
L’âne Martin, comme son maitre allait d’un pas tranquille et régulier, insensible aux ronces qui parfois s’accrochaient à sa peau. Il traversait la campagne, les ruisseaux, parfois même les rivières, sans jamais se départir de son petit air doux et apaisant. Lorsque des touristes voulaient faire des ballades, les deux Martin partaient avec eux en randonnée, leur permettant ainsi d’apprécier les différents aspects de la montagne corse et Martin animal attachant, agréable partenaire avec des cotés ludiques, allait toujours de son pas lent et sur, rassurant les moins courageux.
Tout ceci n’expliquait point pourquoi on parlait d’escaliers à pas d’âne. A vrai dire s’il était facile pour Martin de faire grimper son âne dans des raidillons il n’était point question par exemple, de lui faire monter les escaliers qui menaient à l’Église en haut du village. Le temps passa, après l’hiver arriva le printemps, et les deux Martin reprirent leurs promenades. Cette journée particulièrement ensoleillée, les premières fleurs dans les champs les encouragea à aller plus loin que de coutume et c’est ainsi qu’ils découvrirent un nouveau village implanté sur une colline assez pentue et dont la rue principale était constitué par un escalier, ayant un grand giron et des marches de faible hauteur.
Tout doucement, sans se départir de son calme, avec un pas bien rythmé, l’âne de Martin monta les marches sans effort dans cet escalier assez large et c’est ainsi que Martin le maître, découvrit ce qu’était des escaliers «à pas d’âne ».