M'amzelle Jeanne hélas ni par magie ni en réalité je n'ai été :
" connu.. aimé... Vous avez été le partenaire... le modèle... Vécu dans l'univers d'un homme (ou d'une femme) connu du siècle dernier.. ou de celui d'avant..."
Aussi je vais demander au père Gaétan de vous raconter son histoire :
Le bateau rentrait au port après avoir traversé moult tempêtes. Enfin le calme était revenu et les voiles bien amarrées permettaient de prendre enfin un temps de pause. Les bouteilles vides de vieux rhum s’entassaient sur le sol de la cale, la flamme de la lampe tempête vacillait un peu au gré des mouvements du bateau, pendant que chacun y allait de son histoire.
Le père Gaétan, le plus vieux des marins présents, un peu en retrait, n’avait pas envie de raconter la sienne, après tout c’était « son » histoire à lui, de celle qu’on garde au fond de son cœur jalousement. Il y a des moments de la vie qu’on n’a pas envie de partager. La pression des autres compagnons devenant de plus en plus insistante et une rasade de plus de rhum, eurent raison de sa résistance.
— Heu voilà, j’étais tout jeunot et j’embarquais pour la première au port de Saint Malo, je n’étais pas encore ridé par le vent et la mer à ce moment là…
Pendant que Gaétan se plongeait dans ses souvenirs, un silence complet se fit dans la cale et on n’entendait plus au dehors que le grincement des filins. Chacun retint son souffle, c’est qu’il ne fallait pas l’interrompre le Gaétan sinon on risquait de ne pas avoir la suite de l’histoire.
— C’était un jour gris du mois de novembre et nous partions pour aller chercher des épices et de la soie, vers les Indes. J’avais le cœur un peu serré de devoir quitter la mère mais les récits des marins me donnaient envie de tenter l’aventure et puis je n’avais pas vingt ans, diantre et c’était le moment ou jamais. J’avais bien fait quelques petits voyages, mais les Indes il y avait de quoi rêver …
Il marqua encore un temps de pause, mais personne ne se risqua à le bousculer.
— Nous naviguions depuis plus de deux mois, les tempêtes alternaient avec le calme plat, parfois pas le moindre souffle de vent dans les voiles. J’avais hâte de voir un peu de terre ferme mais il fallait prendre patience et les corvées à bord avaient de quoi m’occuper. Une nuit sombre ou les vagues montaient par-dessus bord, la vigie nous alerte après avoir entendu une corne de brume. Tout le monde est sur le pont scrutant la mer avec difficulté, des heures passent et à l’aube, juste à quelques encablures nous apercevons une goélette à tribord. Des hommes s’agitent sur le pont et comme je suis le plus jeune, je suis dépêché pour voir de quoi il retourne. Un homme est malade à bord et surtout ils manquent de vivres n’ayant pas prévu que le voyage serait si long à causes des tempêtes.
Notre capitaine qui respectait les lois de la mer, leur donne une partie de ce que nous possédons et me charge de faire le transfert. Alors que j’aidais les matelots de la goélette, j’aperçois dans un coin à l’abri, un homme entrain d’écrire, indifférent à ce qui se passe autour de lui. Moi qui savais tout juste écrire mon nom, je me plante devant lui, ébahi et regarde les parchemins sur lesquels il y avait tout un tas de signes. Et bien les gars vous me croirez ou pas mais cet homme là c’était un homme de bien ! Oui comme je vous dis ! Comme il finit par voir combien je l’observe, il se présente à moi et me dit qu’il s’appelle, Pierre Loti, et qu’il était entrain d’écrire un livre sur l’Inde, dont leur bateau revient.
Un écrivain , vous vous rendez compte ? Pierre Loti vous en avez entendu parler les gars ? C’est un sacré bonhomme et un sacré marin, je vous le dis moi . Voilà le début de ma rencontre avec Pierre Loti, pour le reste c’est mon secret. Passe moi donc un peu de rhum moussaillon !
N.B Ce petit conte a été écrit en 2010 pour un défi...
il m'a fait un clin d'oeil et m'a dit : peut être ben que je pourrai faire l'affaire!